À l’Atelier Saint-Luc, la passion de la reliure s’est transmise sur quatre générations. C’est ainsi que l’entreprise sarthoise a réussi à perpétuer son savoir-faire tout en l’adaptant aux exigences contemporaines…
Rencontre avec sa Directrice, Cécile Barrier.
« Je savais relier avant de savoir lire », aime à raconter Cécile Barrier, Directrice générale de l’Atelier Saint-Luc depuis 1982. Elle est, en effet, la petite-fille de la fondatrice, Marthe Froment, qui décida de se lancer dans la reliure d’art en 1947, après avoir élevé ses six enfants. C’est ensuite avec son père que l’entreprise se développe en se lançant sur de nouveaux marchés, moins confidentiels, comme celui des bibliothèques municipales.
LA RELIURE DANS TOUTES SES DIMENSIONS
Quand Cécile prend le relais, avec Claude, son mari, le développement de l’entreprise familiale se poursuit. Ils travaillent ainsi pour des bibliothèques municipales, départementales et universitaires partout en France, des administrations, des archives, des musées (comme le Louvre !) et même la Bibliothèque nationale… Saint-Luc s’étoffe, compte jusqu’à 25 personnes et traite désormais près de 20 000 livres par mois.
Sa force : une gamme de savoir-faire à la fois précis et variés. Les équipes sont ainsi en mesure de consolider des romans, des mangas, des périodiques, des BD, des beaux livres, etc., mais aussi restaurer dans les règles de l’art un livre datant du XVIIe siècle…
« Dans les premiers cas, la reliure cousue peut prendre une vingtaine de minutes. Dans le dernier, où le travail est plus précis et soigné, il faut compter huit heures minimum », explique Cécile Barrier.
Point commun cependant entre les deux approches : la standardisation n’est pas envisageable. « Notre métier est encore très manuel. Les livres à traiter sont tous différents et jamais en gros volumes. Il n’est donc pas possible d’avoir une machine qui puisse s’adapter à tous les cas de figure. Nos outils, ce sont nos mains. »
L’ART DU SUR-MESURE
Le savoir-faire est resté manuel, mais il n’est pas pour autant figé. La volonté de Cécile et Claude a ainsi toujours été d’allier tradition et innovation : par choix, « car nous avions envie de montrer une image de relieur dépoussiérée », mais aussi par nécessité, pour répondre aux besoins des clients. « Fini les reliures lourdes, pleine toile, avec leur pièce de titre (c’est-à-dire le morceau de cuir placé sur le dos du livre). Les bibliothèques ne demandent plus cela. Il faut être plus attractif et moderne, mais aussi moins coûteux. Nos principaux clients viennent du secteur public. Nous avons donc pris en compte leurs contraintes budgétaires.»
Cette adaptabilité est même devenue une marque de fabrique. L’atelier a ainsi déployé des trésors d’ingéniosité pour réussir à consolider des livres atypiques – à l’instar des « Découvertes Gallimard », véritables casse-têtes avec leur reliure en spirale recouverte d’une jaquette, ou encore des BD aux couvertures trop souples. « Nous avons dû inventer des dispositifs de reliure totalement inédits. »
Cette créativité ne devrait pas se démentir dans les prochaines années. Car la relève est désormais prête. À la fin de l’année, la fille de Cécile et Claude, Lucie, reprendra à son tour le flambeau. L’Atelier Saint-Luc, une histoire de famille, mais surtout de passionnés par leur métier…