Encouragées par leurs clients, nombre d’imprimeries investissent dans des machines d’impression et de façonnage dédiées au support carton. Saut qualitatif, diversification ou bascule d’un marché à l’autre, les stratégies diffèrent. Mais qu’il s’agisse de packaging (carton compact) ou de PLV (carton ondulé), ces produits techniques et écologiques ont le vent en poupe.
« Rendez-vous compte : à l’origine, Matarese était une petite imprimerie de labeur, avec une clientèle dans le milieu de la banque, de l’assurance et du courtage située à 80 % à Paris, contre 20 % seulement en local. En deux décennies, la proportion s’est totalement inversée, nos clients sont aujourd’hui à 80 % dans l’Indre. » L’explication de ce phénomène, fournie par Nicolas Chapeyroux, co-gérant de l’imprimerie, tient à la proportion croissante du cartonnage dans son chiffre d’affaires.
Un virage pris sous l’impulsion de Pyrex
En 2007, Nicolas Chapeyroux et Stéphane Martinat ont repris l’entreprise dont ils étaient salariés. « Nous avons fait notre mue progressivement, et nous ne regrettons pas car il aurait été impossible de poursuivre notre activité uniquement sur l’impression de documents administratifs, notre métier de base. »
La dématérialisation des factures, notamment, est passée par là, sans parler de la fin des prospectus. « Nous avions pris une option « fort grammage » sur notre presse 6 couleurs sans savoir qu’on allait faire du carton, se souvient Nicolas Chapeyroux. Cela s’est avéré un choix judicieux. » Le virage a été pris sous l’impulsion d’un de leur client historique. Pour son usine Pyrex de Châteauroux, la Maison Française du Verre a demandé à Matarese de fabriquer des emballages en carton pour ses produits. « Il nous ont mis le pied à l’étrier », commente l’entrepreneur.
En 2017, pour faire face aux volumes croissants, l’entreprise s’est installée sur un nouveau site, à Déols. Mais c’est en 2021 et 2022 qu’un investissement majeur de 650 000 euros a été réalisé dans une presse de découpe avec éjection automatique et une machine de pliage-collage. Un conducteur offset expérimenté a été formé à l’utilisation du nouvel équipement tandis qu’un alternant était embauché pour reprendre son poste.
Des clients sensibles aux circuits courts
Pour Matarese et ses 16 salariés, l’avenir se trouve résolument du côté du cartonnage. Pendant la crise du Covid, alors que les clients du tourisme et de la banque (entre autres) réduisaient leurs volumes, les commandes de Pyrex ont maintenu l’entreprise à l’équilibre. Le conflit en Ukraine en revanche, avec la hausse du prix de l’énergie et des matières premières, l’a contrainte à souscrire un Prêt Garanti par l’Etat (PGE).
L’optimisme et les ambitions sont pour autant intacts. « En 15 ans, nous avons plus que triplé la surface de production, triplé notre chiffre d’affaires et doublé notre effectif », se félicite Nicolas Chapeyroux qui peut compter sur de nouvelles références comme les laboratoires Fenioux (« des compléments alimentaires à base de plantes médicinales locales ») ou le Domaine apicole de Chezelles, tous deux basés dans l’Indre.
« Tant pour le côté environnemental que pour le service, nos clients sont très attachés aux circuits courts. »
Plus de technicité et de compétences
Le parcours de la société FP Mercure présente des similitudes avec celui de Matarese. Créées dans les années 80, les Imprimeries Mercure étaient jusqu’au milieu des années 2010 une imprimerie traditionnelle de labeur (5 à 6 personnes) qui réalisait des documents commerciaux et administratifs.
« En 2014, j’ai repris l’entreprise avec l’idée de la repositionner sur un marché à plus forte valeur ajoutée, avec plus de technicité et de compétences », explique Frédéric Corbo. Dans un premier temps, la diversification s’est faite dans le packaging, de petites et moyennes séries d’emballages (étuis, boîtes, coffrets) pour des marques de produits cosmétiques, alimentaires ou médicaux.
« À la demande de nos clients, nous avons ensuite mis un pied dans le monde du carton ondulé sur des coffrets e-commerce ou en PLV. Cela nous a permis d’avoir une complémentarité d’offre en restant dans notre cœur de métier, l’impression de supports et la transformation. Recyclable, le matériau carton correspond à nos valeurs pour la préservation de l’environnement. »
Un acteur référent sur les petites et moyennes séries
L’an dernier, arrivée à la limite de ses capacités de production, l’entreprise qui compte désormais 28 personnes a ouvert un second site de 4 000 m² où elle a transféré ses équipes et ses équipements dédiés à la production de cannelure (PLV et carton ondulé), soit 20 % de son chiffre d’affaires. Sur le marché du packaging, FP Mercure a élargi son positionnement sur des gammes premium de vins, spiritueux, champagnes, parfums et cosmétiques. « Nous sommes sortis de la nasse où nous nous battions sur les prix et les délais pour bâtir une réputation d’acteur référent, aux côtés de grands noms de cartonniers très bien positionnés sur les grandes séries », témoigne Frédéric Corbo.
Un niveau de qualité homogène
« Depuis le Covid, nos clients reviennent fabriquer en France. C’est bon signe, il faut être prêt pour répondre à la demande. » En 2017, Jérôme Marcoux a repris l’entreprise familiale, l’Imprimerie-Cartonnage Marcoux spécialisée dans l’impression sur tout support : un peu de papier, du synthétique, du bois et même de la moquette, mais surtout du carton. « L’emballage carton représente 60 à 70 % de notre production pour des clients dans la mécanique, l’alimentaire ou des laboratoires, c’est-à-dire autant de vis que de biscuits ou que de vaccins », explique le dirigeant.
L’an dernier, la PME (25 personnes) située à Saint-Just-Malmont, en Haute-Loire, a procédé à un investissement de 4,5 millions d’euros pour le remplacement de ses deux presses offset. « J’ai décidé de changer les deux machines en même temps pour ne pas pénaliser mes clients et leur offrir la même qualité », confie Jérôme Marcoux qui a reçu une aide à hauteur de 20 % dans le cadre du plan France Relance *.
En concertation avec les salariés
L’investissement était envisagé depuis quelques années, en concertation avec les salariés. « Tout a été décidé avec eux, affirme le dirigeant, nous avions prévu de mettre les moyens pour bien travailler, avec des machines incluant le séchage UV et des options d’ergonomie et de confort. » Grâce à l’éventail de ses clients, l’Imprimerie-Cartonnage Marcoux maintient un volant d’affaires élevé. Ses investissements lui permettent de mieux maîtriser les délais et de développer encore de nouveaux marchés. Depuis peu, elle fournit BV Sport, un spécialiste stéphanois en équipements sportifs ou encore la laiterie Gerentes, une institution ardéchoise.
« En 2024, nous allons investir dans des machines de façonnage, indique Jérôme Marcoux, mais nous cherchons surtout à recruter dans le secteur du carton, de la découpe et du pliage-collage, des personnes motivées que l’on peut former. » Le message est passé.
* Un plan exceptionnel de 100 milliards d’euros déployé par le Gouvernement autour de trois volets : la transition écologique, la compétitivité et la cohésion.
Ce plan est soutenu financièrement à hauteur d’environ 40 milliards d’euros par l’Union européenne.
Pour en savoir plus :
https://www.economie.gouv.fr/plan-de-relance
« Du carton à la boîte, plus d’un siècle et demi de création »
Un petit détour cet été par Valréas ? Unique en France, le musée du Cartonnage et de l’Imprimerie y retrace l’histoire des modes de fabrication et d’impression de la boîte en carton, du milieu du 19e siècle à nos jours. Les objets présentés rendent hommage à cette enclave du département du Vaucluse, située au sud de la Drôme, berceau du cartonnage français dont l’entreprise Packetis, spécialisée dans la fabrication d’emballages pharmaceutiques, reste la digne représentante. La collection permanente offre un tour d’horizon des différentes phases de fabrication des boîtes et étuis pliants en carton imprimé, destinés aux emballages de pharmacie, bijouterie, parfumerie, confiserie.
Historique du cartonnage, organisation du travail en atelier et à domicile, lithographie ou typographie, différentes thématiques sont développées, complétées par des expositions temporaires de créations contemporaines.
Vous y rendre :
3, avenue Maréchal-Foch 84600 Valréas (Vaucluse)